Les 4 points clés de cet article :

  • Et si le numérique responsable devenait enfin lisible ?
    Une approche intégrée, simple et accessible : MIKUJY propose une nouvelle manière d’accompagner les entreprises.
  • Un chiffre qui interpelle : 43 %.
    C’est le niveau moyen de maturité numérique responsable en Suisse. Que révèle ce benchmark inédit et pourquoi ce chiffre pourrait bien être le début d’un virage stratégique ?
  • Trois idées reçues qui freinent la transition : Le numérique serait immatériel ? L’efficacité suffirait à être sobre ? Et la durabilité coûterait trop cher ? Ces croyances sont démontées avec des données concrètes.
  • Des actions simples, mais puissantes : un diagnostic en une heure, des gestes visibles, un benchmark pour se situer.

Fondée en 2022 à Neuchâtel, MIKUJY est une entreprise pionnière dans l’accompagnement des organisations suisses vers un numérique responsable. Son fondateur et CEO, Ivan Mariblanca Flinch, nous partage les résultats et enseignements de son premier benchmark suisse du numérique responsable, ainsi que sa vision d’un avenir où innovation et sobriété ne sont pas incompatibles.

MIKUJY est devenu un acteur incontournable du numérique responsable en Suisse. Qu’est-ce qui vous distingue dans un écosystème en forte évolution ?

MIKUJY s’est développé sur une conviction simple : le numérique responsable doit être lisible, mesurable et actionnable. Trop souvent, les initiatives sont cloisonnées – ici de la sensibilisation, là un bilan carbone, ailleurs de la formation. Nous avons voulu intégrer tout le parcours, depuis l’éveil des consciences jusqu’à l’obtention d’un label reconnu.

Ce qui nous distingue tient à deux choses : d’abord, notre approche all-in-one. Nous proposons une plateforme en ligne pour piloter les données, mais aussi des services de conseil et de formation. L’organisation n’a qu’un seul interlocuteur. Ensuite, notre posture est volontairement simple : nous refusons le techno-solutionnisme et la complexité paralysante. Ce que nous mettons en place doit être compréhensible et utile pour tous les niveaux de l’entreprise, de l’IT à la durabilité, aux RH ou aux achats.

Vous venez de publier le premier benchmark suisse du numérique responsable. Pourquoi cette initiative, et que révèlent les résultats?

Nous sommes partis d’un constat : aucune donnée agrégée n’existait en Suisse pour mesurer où en sont les organisations privées et publiques. Nous avions besoin d’un socle commun pour objectiver les débats, sortir des intuitions et partager les bonnes pratiques. Ce benchmark repose sur un panel de 40 organisations de tailles et secteurs variés. Il fournit un état des lieux des pratiques, des perceptions, et de la maturité des acteurs face à ces enjeux.

Les résultats montrent une maturité moyenne de 43 %. C’est modeste, mais ce n’est pas une surprise. Le numérique responsable est encore jeune. Ce qui est encourageant, c’est la dynamique : nous voyons une nette accélération de l’intérêt pour le sujet, portée notamment par les jeunes générations, la pression des appels d’offres, et la volonté croissante de cohérence entre communication RSE et réalité opérationnelle.
Le benchmark montre aussi des disparités marquées. Certaines organisations sont très avancées dans la gestion de leurs équipements ou dans l’optimisation logicielle, souvent pour des raisons de sécurité ou de coûts plus que de durabilité. Mais les volets gouvernance, formation et communication interne sont nettement en retard. C’est là que les directions doivent concentrer leurs efforts.

 Le rapport parle d’une empreinte numérique mal comprise. Quelles sont les principales idées reçues que vous rencontrez sur le terrain ?

La première idée reçue, c’est que le numérique serait immatériel, et donc peu impactant. En réalité, l’empreinte environnementale provient majoritairement de la fabrication des équipements : extraction de métaux rares, usage massif de ressources, logistique. La fabrication compte souvent pour plus de 70 % de l’empreinte totale. Ce n’est pas la suppression des e-mails qui fera la grande différence.

La deuxième idée (fausse), c’est de confondre efficacité et sobriété. Optimiser un datacenter ou réduire la taille d’un fichier, c’est utile, mais cela ne suffit pas si, en parallèle, on multiplie les usages superflus. Il faut apprendre à dire non à certaines innovations quand elles ne répondent à aucun besoin réel.
Enfin, troisième point, le lien avec les coûts est mal perçu. Or, prolonger la durée de vie des équipements, mutualiser les impressions ou former les équipes à des usages sobres, c’est aussi économiquement pertinent. Le benchmark montre clairement que les organisations qui structurent leur démarche autour de la rentabilité en tirent plus de valeur que celles qui s’arrêtent à des objectifs purement symboliques ou écologiques.

On parle beaucoup d’intelligence artificielle aujourd’hui. Comment la concilier avec un numérique plus sobre et responsable ?

L’IA cristallise beaucoup de fantasmes et de craintes. Son impact environnemental est réel, en particulier sur la consommation d’énergie liée à l’entraînement des modèles, mais surtout à leur usage massif. C’est un vrai sujet de sobriété.

Cela dit, l’IA n’est pas intrinsèquement nocive. Tout dépend de ce qu’on en fait. Il existe des IA locales, plus légères, plus transparentes, mieux hébergées. Et surtout, il est possible d’intégrer la durabilité dès la conception : choix du modèle, fréquence d’appel, cycle de vie, code sobre…

Ce que nous défendons, c’est une posture de discernement : pas de rejet dogmatique, mais pas d’acceptation aveugle non plus. Si l’IA sert à automatiser une tâche pénible, réduire le nombre de vols de maintenance dans l’aviation, ou améliorer l’accessibilité d’un service public, alors elle a du sens. Mais si elle multiplie les usages gadgets ou opacifie les décisions, c’est une perte nette pour la société.

Quelles actions concrètes recommanderiez-vous aujourd’hui à une PME qui veut s’engager ?

La première étape, c’est de faire un diagnostic. Pas besoin d’une usine à gaz. En une heure, on peut déjà avoir une vue claire sur l’état du parc informatique, les pratiques d’achat, les durées de vie, les usages logiciels, etc. Cela permet de poser des priorités.
Ensuite, je conseille de choisir une ou deux actions simples mais visibles : prolonger les durées de vie des équipements, dématérialiser certains flux papier, former les utilisateurs à la sobriété numérique… Ces actions montrent l’exemple et créent une dynamique interne.

Enfin, je recommande de se comparer. Participer au benchmark MIKUJY, c’est accéder à un référentiel clair, bénéficier de conseils personnalisés, et surtout voire où l’on se situe par rapport à d’autres. Cela dédramatise le sujet, et donne envie de progresser.

L’édition 2026 du benchmark est déjà en préparation et nous commençons à contacter les futurs participants. Pour les membres de l’ASD, c’est une opportunité unique de rejoindre une démarche structurante et collaborative. Le numérique responsable n’est pas une mode, mais un passage nécessaire vers un modèle plus résilient et aligné avec les enjeux environnementaux, sociaux et économiques de notre époque.

Ivan Mariblanca Flinch est fondateur de MIKUJY, expert suisse reconnu en durabilité numérique et auditeur de référence du label international Numérique Responsable. Connu comme “le moine technologique”, il a opéré en 2021 un virage extrême depuis les industries polluantes vers le Green IT. Il accompagne aujourd’hui les organisations dans la réduction de leur empreinte et coût numérique à travers une approche mêlant SaaS, conseil stratégique et formation. Conférencier, intervenant en CAS et auteur du livre « Un autre univers numérique est possible », il s’engage pour un numérique plus simple, humain et durable